Et si on jouait... (18)

...les écrasantes angoisses cosmiques et les réflexions d'êtres vivant dans un futur très, très, très, très, très, très, très lointain, qui se retrouvent confrontés à ces sujets malaisants mais tellement éloignés de nous qu'ils nous semblent irréels, comme la mort du Soleil et de l'univers entier ?

J'ai récemment découvert la chaîne youtube Kurzgesagt qui publie de courtes vidéos de vulgarisation scientifique, dont certaines - savamment regroupées dans une playlist bien nommée Existential Crisis playlist - présentent avec une infographie sympathique et une voix off un peu sarcastique quelques perspectives assez effrayantes issues de l'astrophysique. Il y a une sorte de fascination malsaine à se confronter à des idées comme celle de la mort de toutes les étoiles, l'idée qu'il devrait exister un jour une date qui serait celle de la fin de la dernière étoile, et donc que le cosmos deviendrait complètement sombre. C'est mentionné à la fin de celle-ci notamment et on trouve sur la chaîne toutes sortes d'autres joyeusetés. Par exemple, l'idée qu'une réaction en chaîne complètement absconse ayant pour objective de... détruire les lois de la physique pourrait naître à l'autre bout de la galaxie sans qu'on n'y puisse rien et grossir jusqu'à faire disparaître la Terre instantanément avant que l'on ne s'en rende compte. Je ne sais pas quel degré de sérieux peut être attribué à ces travaux mais je trouve l'esthétique dévorante qu'ils inspirent particulièrement plaisante pour elle-même.

Encore une pour la route ? Celle-ci résume quelques jolies angoisses et termine sur une note nettement plus positive, qui explique la philosophie et en quelque sorte la raison d'être de la chaîne.

Imaginons un futur extrêmement lointain. Des êtres humains, ou leurs successeurs plus évolués, vivent avec une technologie parfaitement autosuffisante. Un pilote de vaisseau spatial peut régénérer son corps à l'infini, recharger ses batteries grâce à la lumière solaire, transformer n'importe quelle matière en n'importe quelle autre à l'aide d'un convertisseur universel et donc se sustenter où qu'il soit en transmutant des débris stellaires. De plus, ils peuvent ralentir leur perception du temps ou se cryogéniser et laisser l'ordinateur de bord voyager de lui-même. S'il faut un million d'années pour atteindre l'étoile la plus proche, eh bien, soit. Enfin, toutes les planètes sur lesquelles se trouvaient la vie, les usines, les moyens de production, tout a disparu dans une faille de vacuum decay. Il ne reste plus qu'une centaine de pilotes humains en vie, capables de vivre de façon autonome et indéfinie, capables de voyager où ils veulent. Disons en plus que toute reproduction est impossible.

Que feriez-vous ?

Jouons la confrontation permanente de ces personnages à un cosmos qui a pendant un temps été leur motivation vitale (ils sont devenus pilotes indépendants pour une raison !) et capables à l'envi d'explorer les mystères les plus incroyables de l'univers - observer de près une étoile à neutrons, une supernova, un trou noir... et la mort même de l'univers. L'esprit face à la pure beauté hors norme du cosmos est un thème que j'avais déjà voulu aborder dans le dixième billet de cette série, et qui revient me fasciner périodiquement.

Ou, plutôt que de jouer l'intériorité d'êtres tellement loin de nous, jouons à travers ces histoires à construire et explorer nos propres angoisses astrophysiques, pour le plaisir dérangeant qu'elles nous procurent.